L'incroyable histoire de Notre-Dame de Paris
Le 7 décembre prochain, tous les regards seront braqués sur elle, pour sa réouverture. Monument emblématique de Paris et symbole de l'art gothique, la cathédrale Notre-Dame est un chef-d'œuvre architectural qui résiste au temps depuis plus de huit siècles.
Avec près de 12 millions de visiteurs par an, Notre-Dame était l'un des monuments les plus visités au monde, jusqu'à ce qu'un terrible incendie ne vienne détruire une partie de son édifice en 2019. Et vous allez voir que ce n'est pas la seule épreuve que la cathédrale a dû affronter au fil de son histoire...
Au milieu du XIIᵉ siècle, Paris est une ville en plein essor. Devenue un centre économique et politique majeure sous les Capétiens, elle compte 25 000 habitants. Mais, alors que les constructions de cathédrales se multiplient en France, Paris n'a plus la sienne.
D'après certains écrits et des fouilles archéologiques, la cathédrale Saint-Étienne se situait sur l'île de la Cité, au niveau du parvis actuel de Notre-Dame. La cathédrale aurait été en ruines au début du XIIᵉ siècle, avant d'être complètement détruite pour la construction du nouvel édifice.
Photo : Wikimedia Commons
Évêque de Paris entre 1160 et 1196, Maurice de Sully est à l'initiative de la construction de Notre-Dame de Paris. Proche de la famille royale française et influent jusqu'en Angleterre, cet homme d'Église est aussi très ambitieux. Il veut construire une cathédrale aux dimensions exceptionnelles pour accueillir le plus grand nombre de fidèles. Et cela tombe bien, car il en a les moyens.
Maurice de Sully s'inspire des édifices gothiques de l'époque pour imaginer sa cathédrale, à l'image de la basilique Saint-Denis (photo), où se trouvent les tombeaux des rois de France et qui a été rénovée autour de 1140 pour en faire un espace plus lumineux. Comme pour l'intérieur de cette basilique, l'évêque de Paris veut faire "entrer la lumière" dans Notre-Dame.
Le nom de l'architecte qui a conçu Notre-Dame de Paris reste inconnu, mais il était particulièrement audacieux. Il livre le plan d'une cathédrale gigantesque, la plus grande d'Île-de-France. Le chantier commence en 1160, et la première pierre de la cathédrale est posée en 1163. S'ensuivront plusieurs phases de construction, jusqu'en 1345, menées par différents maitres d'œuvre.
C'est le chœur de Notre-Dame qui a été construit en premier. Les voûtes reposent sur des arcs en ogives et des arcs-boutants, visibles de l'extérieur, qui permettent de limiter le risque d'effondrement.
Le chœur de la cathédrale est consacré en 1182 par le cardinal Henri de Château-Marçay. À partir de ce jour, des reliques sont accueillies dans la cathédrale. Les plus prestigieuses, des "Reliques de la Passion" y sont emmenées en 1239 depuis Jérusalem. Ainsi, Notre-Dame de Paris conserve aujourd'hui de véritables trésors, comme la Couronne d'épines du Christ, un fragment de bois de la Croix, et un Clou.
La construction de la nef débute après la consécration du chœur, en 1182, sur quatre travées, et prendra fin au cours du XIIIᵉ siècle. Ses murs, lisses et fins, sont l'une des signatures de Notre-Dame, tout comme le rythme régulier entre verticalité (pilastres, colonnettes, piliers...) et horizontalité (arcades, chapiteaux).
Photo : Jianxiang Wu / Unsplash
Surnommée "la forêt", la charpente de Notre-Dame de Paris se composait d'environ 1 200 chênes et était indispensable à la cathédrale, sa masse assurant la cohésion de l'ensemble. Elle était aussi un véritable atout pour la sécurité de l'édifice, comme on l'a vu lors de l'incendie de 2019 lorsqu'elle s'est entièrement consumée tout en protégeant le monument. Mais la charpente que nous connaissions n'était pas la première de la cathédrale.
En 1218, la veille de l'Assomption, des voleurs se seraient introduits dans la cathédrale et auraient renversé une chandelle, selon certains récits. Le chœur de Notre-Dame se serait alors embrasé et la charpente serait partie en cendres. En 1220, une nouvelle campagne de travaux est alors lancée, et la charpente est complètement refaite.
La tour sud et la tour nord sont respectivement érigées en 1240 et 1250. S'élevant à 69 mètres de hauteur, elles ont été les plus grandes tours de Paris, jusqu'à ce qu'elles soient détrônées par la Tour Eiffel en 1889.
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Construites au Moyen Âge, les gargouilles ornent les extrémités des gouttières de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Leur fonction est de protéger le monument de l'eau de pluie. Étant dans le vide, elles projettent l'eau loin des murs de la cathédrale, ce qui évite de les abîmer. Ces gargouilles ont la forme d'animaux fantastiques, plutôt effrayants.
Les vitraux de Notre-Dame de Paris sont de véritables chefs-d'œuvre à eux seuls. Certains sont d'origine, mais la plupart ont été restaurés. La Rose sud (photo), aussi appelée "rose du Midi" a été édifiée vers 1250, et mesure près de 13 mètres de diamètre.
La cathédrale parisienne compte trois portails d'entrée sur sa façade ouest, construits entre 1200 et 1240. Le portail du Jugement dernier est au centre, le portail de la Vierge à gauche, et le portail de Sainte-Anne à droite.
Juste au-dessus des portails, vous pouvez observer la galerie des rois, une bande horizontale où sont illustrés vingt-huit personnages, correspondant aux 28 générations des rois de Judée. Associées à tort au royaume de France, ces statuettes ont été détruites ou mutilées pendant la Révolution française.
Après la Révolution française, dans la première partie du XIXᵉ siècle, Notre-Dame est dans un piteux état. La galerie des rois a été vandalisée, de l'eau s'infiltre dans les voutes, et sa flèche médiévale, construite au XIVᵉ en bois et en plomb, et culminant à 78 mètres de hauteur, a été démontée entre 1786 et 1792 car elle était trop dangereuse pour l'édifice. Mais un homme va venir sauver la cathédrale.
Indigné par les dégradations de la cathédrale, Victor Hugo publie en 1831 "Notre-Dame de Paris", un roman qui va influencer l'histoire du monument. La popularité de l'écrivain est telle, qu'il mobilise toute la population française dans le sauvetage de la cathédrale.
En 1843, les architectes Jean-Baptiste Lassus et Eugène Viollet-le-Duc, spécialisés dans la restauration de monuments médiévaux, se plongent dans l'histoire de la cathédrale, inspectent toutes ses failles et proposent un projet de restauration. La toiture est réparée, le bâtiment est renforcé, des pierres usées sont remplacées... et quelques innovations viennent offrir un supplément d'âme à la cathédrale.
Lorsqu'il est appelé pour restaurer la cathédrale, Viollet-le-Duc n'a alors que 29 ans. Ce surdoué de l'architecture reprend seul le projet de restauration lorsque Jean-Baptiste Lassus meurt brutalement en 1853. En réalité, cela va lui permettre de laisser libre cours à son imagination...
Contrairement aux gargouilles, les chimères ont été imaginées au XIXᵉ siècle, et sont des œuvres de Viollet-le-Duc. Ces créatures, aux allures diaboliques, se situent tout en haut de l'édifice, et n'ont aucune fonction structurelle, seulement décorative.
La reconstruction de la flèche a d'abord été pensée à l'image de l'originale, qui datait de l'époque médiévale. Mais une fois seul, Viollet-le-Duc a voulu créer une flèche démesurée. Celle-ci, tout en chêne recouvert de plomb, s'élevait à 93 mètres de hauteur et pesait 750 tonnes. Un exploit architectural qui sublimait la cathédrale depuis le 15 août 1859, date de son inauguration. Lorsqu'elle s'effondre dans les flammes, en avril 2019, c'est le cœur de tous les Parisiens qui s'est meurtri.
Cette image a fait le tour du monde, entrainant une très forte émotion, entre inquiétude et tristesse. Le 15 avril 2019, en fin d'après-midi et alors que la cathédrale est en travaux de restauration, un incendie s'est déclaré dans la charpente en bois, au niveau du chœur de la cathédrale. Les flammes prennent rapidement de l'ampleur, et l'incendie met environ 15 heures à être complètement éteint. Le feu a intégralement détruit la charpente, la flèche, et les toitures de la nef et du transept.
En 2023, la cause de l'incendie reste encore inconnue. Mais deux hypothèses ont été avancées par les enquêteurs : une cig@rette mal écrasée, ou un court-circuit.
Grâce à des fonds privés et publics, des travaux de restauration s'organisent après l'incendie, bien qu'ils soient freinés par la crise sanitaire. La phase de nettoyage prend fin en septembre 2021, et les travaux débutent deux mois plus tard.
Des artisans et ouvriers de toute la France ont été mobilisés pour réparer les toitures, restaurer la charpente, rénover l'orgue et reconstruire la fameuse flèche à l'identique. Des milliers de chênes ont été sélectionnés avant d'être envoyés dans une quarantaine de scieries aux quatre coins de l'Hexagone.
En février 2024, les Parisiens ont à nouveau pu admirer la flèche de Notre-Dame s'élever dans le ciel. Celle-ci a été reconstruite à l'identique sur le modèle de la flèche érigée par Viollet-le-Duc, deux siècles plus tôt.
Avec la fin des travaux, Notre-Dame va bientôt pouvoir rouvrir ses portes au public, et retrouver toute sa beauté et sa prestance qui font d'elle un monument si unique.
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